Bien que les échanges commerciaux entre pays africains aient par
exemple augmenté légèrement ces dernières années (environ US$ 25
000 millions en 1998, soit 10% du total de la région), cette
performance ne correspond pas du tout au regain économique que
connaissent certaines autres régions en développement.
Le marché des approvisionnements des agences humanitaires et de
développement représente une occasion de taille pour les
entreprises africaines. En réussissant à vendre plus de leurs biens
et services aux agences internationales de développement dans le
cadre de projets sur le continent africain, elles serviraient leurs
propres intérêts, et contribueraient à la promotion du commerce
africain intrarégional. Cette idée semble toute simple, mais les
entreprises africaines doivent surmonter certains obstacles.
Des procédures compliquées
Pour le néophyte, les procédures d'adjudication des marchés
peuvent paraître décourageantes. Ainsi, avant même de présenter une
offre et de soumissionner, les entreprises doivent souvent
s'inscrire dans des répertoires de fournisseurs tels que la Base de
données de fournisseurs communs des Nations Unies (BFCNU). Les
représentations locales des agences peuvent attribuer des marchés
pour des montants déterminés. Si l'on compare le HCR et le CICR,
pour des marchés supérieurs à US$ 20 000, le HCR émet des appels
d'offre et octroie le marché au soumissionnaire le moins disant,
tandis que le CICR se tient à US$ 12 500 du seuil pour les appels
d'offre, mais limite la concurrence à des fournisseurs
soumissionnaires agréés, à moins qu'il ne s'agisse d'adjudication
ouverte pour des contrats-cadres.
La tendance positive actuelle est que les agences
internationales de développement souhaitent acquérir plus de biens
et services provenant de la région où se déroulent leurs projets.
C'est précisément à ce stade que le CCI peut agir. Grâce à un
financement de la Norvège, du Danemark et des Pays-Bas, il a pu
mettre sur pied une initiative de coopération technique intitulée
«Favoriser l'accès des entreprises africaines à l'approvisionnement
des agences internationales de développement». Cette initiative
vise deux objectifs principaux: rendre les agences d'aide
attentives au fait que les entreprises africaines peuvent fournir
les aliments, articles médicaux et autres produits nécessaires
qu'elles achètent régulièrement, et aider les entreprises à tirer
parti du potentiel qu'offre le marchés des approvisionnements.
Les rencontres acheteurs/vendeurs
Un des éléments essentiels de l'initiative du CCI consiste à
réunir les entrepreneurs des pays en développement avec les
responsables des achats des agences internationales de
développement au cours d'une série de rencontres
acheteurs/vendeurs, de manière que chacun d'eux puisse s'informer
sur les besoins, priorités et exigences des autres. La première
réunion s'est tenue en novembre 2001 à Nairobi (Kenya) et portait
sur les achats d'articles d'hébergement, de protection et
d'ustensiles domestiques pour les populations éloignées.
Cependant, étant donné la complexité du marché des
approvisionnements de l'aide humanitaire, il est important que les
entrepreneurs africains maîtrisent les règles et les procédures les
régissant. C'est la raison pour laquelle, avant les rencontres
acheteurs/vendeurs le CCI organise des séminaires de formation
d'une journée, conçus pour familiariser les entrepreneurs à
répondre aux appels d'offres des agences humanitaires et exécuter
leurs marchés, ce qui les aide le jour de la rencontre avec les
représentants des agences.
Instaurer la confiance
Les conseillers du CCI mettent notamment en évidence
l'importance de bien comprendre le processus entier de l'appel
d'offres et des obstacles qui n'existent pas lors de transactions
commerciales courantes. Un autre élément crucial est la question de
l'instauration de la confiance. Les agences sont prêtes à
considérer de nouveaux fournisseurs, mais doivent pouvoir néanmoins
être sûres de la livraison de produits de qualité dans les délais,
car la vie de nombreuses personnes est en jeu.
Les séminaires de formation ont été développés pour mettre en
évidence tous ces éléments et mieux préparer les entreprises à
remporter des marchés dans le cadre de projets d'agences
internationales d'aide. Chaque séminaire se compose de cinq
modules. Lors du premier sont discutées les différences entre
achats publics et privés, avec l'exposé des caractéristiques
générales de l'approvisionnement public; des renseignements
détaillés sur les différentes agences ouvrant dans la région sont
également exposés. Le second module traite des méthodes
d'approvisionnement des agences de développement, notamment les
appels d'offres, les spécifications, l'évaluation des offres,
l'attribution et l'exécution des marchés, en d'autres termes
comment le processus se déroule de bout en bout.
Des cas de réussites en Afrique
Le troisième module présente des cas d'entreprises africaines
qui exécutent actuellement des marchés avec de grandes agences
d'aide. Les méthodes utilisées et les problèmes rencontrés sont
décrits, soulignant la capacité d'innovation commerciale nécessaire
à tout fournisseur. Au cours du quatrième module, les participants
se concentrent sur des exercices pratiques, parmi lesquels
l'évaluation des offres, et des exemples d'adjudication de
contrats-cadres.
Le cinquième module est particulièrement important. Il s'arrête
sur un aspect crucial: comment perpétuer la relation de confiance
entre le fournisseur et l'agence lorsque le contrat est conclu. Il
comporte aussi des conseils pratiques émanant des agences pour
soumissionner et exécuter avec succès les marchés.
Une fois la formation terminée, les entrepreneurs posséderont de
solides bases pour se renseigner et mettre en avant leur potentiel
commercial lors des réunions bilatérales avec les représentants des
agences.
Après leur lancement en Afrique, les séminaires du CCI et les
rencontres acheteurs/vendeurs pourraient se répéter à intervalles
réguliers dans d'autres pays en développement.
Au CCI, nous pensons que cette initiative, ainsi que les autres
activités de coopération technique et de promotion commerciale vont
jouer un rôle prépondérant pour redresser le déséquilibre
commercial des pays et des régions en développement.
Cet article se fonde sur un entretien avec Wayne Wittig,
Conseiller principal, Section de la gestion des achats et
approvisionnements internationaux, CCI (wittig@intracen.org)